Traduction des notes d’Eben SADIE, document original : Ebens-Notes-2024-Release
Après avoir connu l’un des hivers les plus humides depuis plusieurs décennies, nous venons de traverser l’une des périodes estivales les plus sèches jamais enregistrées dans le Swartland. Il n’a pratiquement pas plu ici au cours des six derniers mois, mais nous espérons que ces conditions climatiques extrêmes prendront fin.
L’année dernière a sans doute été l’une de nos années les plus chargées, marquée par trois priorités majeures : la crise énergétique, la construction d’un nouveau chai et d’une station de purification de l’eau, ainsi que les travaux routiers et autres aménagements civils.
Dans ce rapport, nous explorerons ces différents aspects et apporterons des éclaircissements. Mais avant tout, nous partagerons un point d’étape sur nos activités viticoles et où nous en sommes.
Nous sommes actuellement en plein processus d’échantillonnage des sols, de classifications et d’analyses. Les sols sont des organismes vivants, et les saisons ainsi que le temps entraînent des changements. Cette année, nous procéderons à un audit de nos sols pour nous assurer que tout est en ordre. Sur la couverture, Johan de Jager de Vinpro dirige les classifications et les études en cours cette année. Au fil des années, nous avons ouvert de nombreuses parcelles et types de sols différents ; année après année, nous enrichissons notre base de données sur les variables.
Lors de la préparation des sols et de la cartographie initiale du terroir, nous utilisons des scanners électromagnétiques pour détecter les différences, car ils offrent une meilleure précision. Cependant, nous creusons également des fosses d’évaluation dans ces zones pour obtenir des mesures et des classifications exactes. Nous continuons à alimenter nos données en fonction des observations sur les sites concernés. Cette année, des ajustements significatifs des sols sont prévus.
VITICULTURE
Cette année est la première où nous n’avons pas effectué de nouvelles plantations, nous concentrant uniquement sur notre programme de complantation dans certains des vignobles plus anciens. Notre priorité actuelle est la transformation du vignoble Treinspoor, et nous fournirons une mise à jour plus détaillée d’ici un an environ.
Nous avons presque manqué le printemps cette année. L’hiver long et persistant s’est prolongé directement dans l’été, nous obligeant, dans certaines de nos parcelles les plus sèches, à enfouir nos couverts végétaux dans les sols. Cette méthode n’était pas idéale pour la gestion des sols, mais c’était la seule solution, car les profils de sol se sont asséchés de manière spectaculaire cette saison, en raison de l’absence de pluies de suivi entre le printemps et le début de l’été.
Nous avons également vu la première récolte du vignoble Sonvang, et nous espérons bientôt partager ce vin avec vous. Ce vignoble est exceptionnel. Malgré la diversité des cépages qu’il abrite, la croissance des vignes y est très uniforme et homogène.
Les nouveaux systèmes de taille en gobelet sont remarquables et représentent une avancée importante en matière d’agriculture. Nous apprécions également beaucoup l’espacement plus large de nos vignes, car les réserves supplémentaires par pied de vigne se sont révélées cruciales. Nos vignobles se présentent désormais comme plus dynamiques et plus vigoureux. La quête de fruits plus frais et de parcelles à acidité élevée reste toutefois un défi constant.
CONSTRUCTION
Le processus de construction est en cours, et nous espérons être proches de la finalisation pour la sortie de cette année, bien qu’il reste encore beaucoup à faire.
Ce fut un processus long, chargé d’émotions, coûteux financièrement et énergivore, mais au final, tout cela sera bénéfique. Nous avons réussi à installer les cuves et à mettre en place l’essentiel pour pouvoir fonctionner juste avant la récolte. C’était une véritable course contre la montre pour avoir les éléments de base opérationnels. Nous ne voulions pas vinifier la récolte 2024 dans l’ancien chai pour ensuite devoir déménager les vins, chaque manipulation ayant un impact sur leur qualité.
Ainsi, nous avons travaillé intensément pour que tout soit prêt afin de loger la totalité de la récolte 2024 dans le nouveau chai dès le premier jour et de conserver la plupart des vins directement à leur destination finale. Ce fut littéralement un sprint final.
Le nouveau chai est une construction de haute spécification, axée sur l’efficacité énergétique, la conservation et la réutilisation de l’eau, ainsi que sur l’optimisation des ressources. Nous prévoyons que la qualité générale des vins s’améliorera également grâce à ces nouvelles installations. Cela nous permettra de mieux suivre tous nos vignobles et de vinifier davantage de parcelles séparément.
L’ancien chai a également été vidé et rénové, et ses bâtiments seront transformés pour devenir des installations de mise en bouteille, d’étiquetage, de logistique et d’expédition.
Nos bureaux déménageront également dans le nouveau chai, et les anciens bureaux seront convertis en centre de formation RH et en locaux pour notre programme de formation des jeunes protégé·es. Autant dire que les projets ne manquent pas.
Enfin, nous aurons également une cuisine professionnelle flambant neuve. À terme, nous prévoyons de cuisiner quotidiennement pour l’ensemble de notre personnel.
ÉNERGIE ET EAU
La plupart des Sud-Africains comprennent bien les frustrations liées à un réseau électrique instable. Notre mission, à ce stade, n’était pas tant de réaliser un investissement massif immédiat, mais nous avions peu d’autres choix et avons donc entrepris la première phase majeure : l’installation d’une centrale solaire, d’un système d’onduleurs et de batteries. Cela nous permet désormais de retirer la majeure partie de notre consommation du réseau. Nous sommes encore connectés au réseau pour le moment, mais nous prévoyons d’augmenter la capacité à un mégawatt avec la prochaine phase de stockage par batterie. À ce stade, nous serons entièrement autonomes.
Les systèmes hors réseau ne sont en aucun cas une source d’énergie bon marché. Cependant, ils permettent de réduire considérablement la consommation de diesel tout en assurant une alimentation électrique ininterrompue, ce qui, malgré un coût élevé, garantit la continuité des opérations.
Philosophiquement, nous ne croyons pas en des systèmes basés sur un réseau unique, car ils impliquent également un fort impact environnemental et une dépendance importante. Cela dit, la technologie évolue rapidement, et grâce à l’emplacement en pente de notre domaine, un éventuel système de turbine hydraulique pourrait offrir à l’avenir une énergie et un stockage encore plus écologiques. Nous avons au moins établi une base solide sur laquelle construire au fil du temps.
En parallèle, nous avons également modernisé notre station de purification d’eau, améliorant considérablement la qualité de l’eau pour la consommation, les processus requis et les usages généraux. Il est important de comprendre que l’eau est une matière vivante. Elle évolue dans la terre (puits, forages, et barrages) et change constamment. Les analyses de notre eau varient de façon significative selon les saisons — hiver, printemps, été, automne — et sa composition chimique évolue considérablement.
Ces variations ont un impact important, et le nouveau système que nous avons conçu et mis en service calibre la qualité de notre eau toutes les 15 secondes. Cela nous garantit une source fiable et régulière d’eau de qualité ultra-premium.
L’eau touche à tout, elle vit avec nous et en nous. Nous devons la respecter, la conserver et la recycler en permanence. Peu importe la quantité dont nous disposons, elle reste la ressource la plus précieuse sur la planète.
LE BOUCHON
La fermeture d’une bouteille de vin a toujours été et restera un sujet de débat. Ce sujet est complexe mais en même temps assez simple. Nous croyons toujours que le bouchon naturel est la fermeture la plus parfaite au monde. Il s’agit d’un produit naturel, même s’il peut contenir un composé chimique appelé 2,4,6-trichloroanisole (TCA), responsable de la plupart des cas de goût de bouchon. D’autres facteurs peuvent être en cause, mais le TCA est de loin le plus fréquent.
L’option la plus sûre reste le bouchon à vis (Stelvin) et, plus récemment, les bouchons techniques conçus de manière ingénieuse. Ces derniers sont constitués de grains de liège moulus, stérilisés via des processus supercritiques, puis liés ou collés ensemble à l’aide de polymères.
Ces deux options (Stelvin et bouchons techniques) sont sûres mais ont également conduit de nombreux producteurs à affirmer qu’elles « stérilisaient » le processus de vieillissement des vins en bouteille. Ainsi, une longue liste de producteurs ayant adopté ces fermetures alternatives est revenue par la suite au bouchon naturel. En fin de compte, le choix repose sur ce que l’on croit que le vin doit être, et la sécurité absolue ne conduit que rarement au meilleur résultat.
Cela étant dit, nous avons investi des millions cette année dans l’achat de bouchons, ce qui constitue, en réalité, notre dépense la plus importante après les coûts des raisins dans la viticulture. Nous avons également été fortement impliqués dans de nouveaux processus d’analyse des bouchons, utilisant des technologies similaires au sonar, et avons également travaillé sur des revêtements à base de cire pour obtenir des taux de transmission d’oxygène (OTR) plus réguliers. Cela permet au bouchon de « vivre » avec le vin en bouteille et de réduire les variations d’une bouteille à l’autre.
Beaucoup de travail est en cours pour améliorer le bouchon naturel de manière urgente. Cependant, l’éléphant dans la pièce est l’impact négatif du réchauffement climatique sur la qualité du liège et les propriétés de la subérine (Quercus suber, ou chêne-liège).
La réalité est qu’il y a de moins en moins de bouchons de grande qualité disponibles dans le monde. Sur le marché ouvert, nous sommes obligés d’acheter des bouchons dans la même catégorie que des producteurs comme Château Lafite, Romanée-Conti ou Biondi-Santi. Au final, tout dépend de l’investissement financier. Sur ce point, nous ne faisons aucune concession. Nous avons également mis en place une politique stricte de remplacement des bouchons présentant un goût de bouchon.